Portrait de Vladimir Horowitz

Mes chers lecteurs,

Dans ce nouvel article, nous allons aborder certainement l’un des plus grands pianistes de tous les temps, Vladimir Horowitz.
Le “dernier romantique”, ami très proche de Serge Rachmaninoff, est incontestablement au rang des plus grands génies de l’histoire du piano entre autres :
Ludwig van Beethoven, Serge Rachmaninoff, Franz Liszt, Alexandre Scriabine, Frédéric Chopin et j’en passe.

Je tiens à mentionner que Vladimir Horowitz, contrairement aux grands noms cités ci-dessus, est principalement connu en tant que pianiste interprète, malgré un savoir-faire remarquable (plusieurs transcriptions, arrangements et compositions à son actif).
Il sera mondialement connu en tant qu’interprète, tout comme son “rival” Arthur Rubinstein, que nous aborderons très certainement dans un autre article.

Vladimir Horowitz est un pianiste ukrainien, né à Kiev (selon ses dires) le 1er octobre 1903.
Mais, en réalité, il semblerait qu’il soit né à Berditchev, un petit village ukrainien principalement habité par des juifs.
A l’apogée de son art, Horowitz sera considéré comme “le numéro un” par d’autres pianistes de son temps, mais aussi par le public. Avec son jeu d’une grande puissance, on le surnommera “le Satan du piano”.
Je trouve qu’il joue avec une virtuosité à couper le souffle, une précision remarquable (sauf en fin de vie, mais à quatre-vingt ans passé, soyons bienveillant), et des pianissimos juste exceptionnels.

Vladimir Horowitz a des capacités de mémoire remarquables ; à quatre-vingt ans, il possédait toujours un répertoire très conséquent et disait même avec son léger sourire moqueur (typique chez Vladimir) :

Je n’ai absolument rien oublié

C’est un pianiste d’une aura incomparable, une personnalité singulière, un profil attachant toujours très souriant, mais ce sourire cache peut-être une forme de pudeur, ou une façon à lui de dissimuler une profonde mélancolie.
Il a souvent été demandé au maestro quel était son compositeur préféré et quelle était sa relation avec celui-ci, il répond toujours :

« C’est la musique que je préfère, mon numéro un. Pour moi, ce n’est pas de la musique classique, mais tout simplement de la musique de bon goût »

Il rajoutera :

Pablo Casais m’a dit un jour : « Vous devez jouer Mozart comme Chopin et Chopin comme Mozart. »

Mozart faisait parfois des erreurs, tout particulièrement sur l’un de ses concertos.
Il composait parallèlement un trio, un quatuor et les Noces de Figaro ; cela faisait beaucoup de notes à écrire, et à trop se disperser, il se peut qu’une erreur soit malencontreusement écrite sur la portée.

Selon Horowitz, il semblerait qu’il y ait une erreur, ou plus exactement, une note injustifiable dans le dernier mouvement du concerto de Mozart.
Ainsi il s ‘exprima :

« Ce n’est pas correct. Mon instinct me le dit. Ça doit être comme ça »

Vladimir Horowitz reste à ce jour le pianiste le mieux payé au monde, principalement grâce à ses enregistrements et ses récitals, mais il se peut que notre très cher Lang Lang vienne nous contredire :).

A sa mort, le New York Times, dans un article intitulé “Vladimir Horowitz, Titan of the Piano, Dies” affirme que celui-ci avait accumulé la modique somme de près de cinq millions de dollars.

Bienvenue dans l’univers de cet immense pianiste qui restera gravé dans les siècles à venir, soyez en sûr !

Famille de Vladimir Horowitz

La famille de Horowitz fait partie de la bourgeoisie juive cultivée d’Ukraine.
Famille de musiciens, la grand-mère de Vladimir est amie avec Anton Rubinstein, quant à sa mère (Sofia), très bonne pianiste par ailleurs, elle connaît personnellement Alexandre Scriabine, qui j’en profite, dira :

« Votre fils a beaucoup de talent, il sera pianiste. Mais il faut une vaste culture générale, des langues, toute la musique, la poésie, la peinture »

Horowitz rajoutera « le secret, il faut connaitre le monde ».

Le père de Vladimir (Samuel), passionné de musique, est ingénieur en électricité, et assure la distribution en Ukraine des moteurs électriques allemands.
C’est son oncle qui lui fera découvrir très jeune le piano ; il le surnomme “l’oncle qui jouait Fort”. Vladimir a pour objectif de jouer aussi bien que celui-ci, chose qu’il ne tardera pas à faire.
Sans demi-mesure, le jeune Vladimir grandira avec la musique dès sa plus tendre enfance, et ne la quittera jamais.

Vladimir est le plus jeune des quatre enfants de Samuel et Sofia Horowitz.
C’est à l’âge de trois ans qu’il découvre sa mère jouant brillamment du piano.
D’après les dires de sa mère, Vladimir Horowitz aurait alors simulé un clavier virtuel sur l’une des fenêtres de leur maison, et aurait brisé la vitre, ensanglantant ses mains.

Vladimir Horowitz gagne sa réputation du plus grand interprète virtuose en jouant Liszt, Chopin, Rachmaninoff, Scriabine, Tchaikovsky.

Horowitz déplaçait des foules pour chacun de ses concerts. Il se produisait à guichet fermé, tout particulièrement pour la haute aristocratie, car les places étaient très chères, longtemps réservées à l’avance pour ceux qui en avaient les moyens.
Son rapport complice et étroit avec le public était manifestement dû à son charisme.
De plus, ses rares concerts étaient très appréciés par le fait qu’ils surpassaient de très loin tous ses enregistrements studio.

Horowitz aime se mettre en danger ; il arrive à des performances absolument incroyables devant des milliers de personnes, prenant de grands risques pianistiques.
Malgré la consécration et l’ovation du public, Horowitz interrompt volontairement sa carrière plusieurs fois, car il souffre de dépressions.

Derrière cet immense génie se cache un parcourt de vie unique. D’une Russie qui était encore celle des Tsars à la solitude New-Yorkaise, il alternera entre périodes de dépressions, des sursauts et ses retours ; voilà en somme la personnalité mélancolique, ombrageuse du pianiste Ukrainien.

Contrairement à ses confrères pianistes, Vladimir n’a pas été un enfant prodige du fait certainement que sa famille l’ait protégé, afin de lui préserver une enfance épanouissante, lui laissant le temps de mûrir et d’assurer son art.

Nous comprenons maintenant pour quelle raison Horowitz n’a pas manifesté l’envie de se produire en public trop tôt.
Selon plusieurs témoignages, le trac, déjà enfant, l’envahissait des semaines avant le moindre récital ou audition, sans doute lié à un certain manque de confiance en lui, qui le suivra toute sa vie. Vladimir est un charmeur né, avec un besoin incommensurable de séduire, de plaire , certainement pour combler un manque d’assurance enfoui.

Composer, voilà l’idée du jeune homme ; comme son ainé Serge Rachmaninoff, figure emblématique qui l’accompagnera tout au long de sa carrière.

Horowitz enfant

Le jeune Horowitz apprend le piano dès son plus jeune âge, plus exactement à cinq ans, d’abord sous la férule de sa mère. Il montrera d’emblée beaucoup de facilité, sa mémoire étant prodigieuse, et son assimilation époustouflante. Il semble être capable de découvrir par lui-même avec une facilité déconcertante l’approche d’ouvrages complexes et surmonte des difficultés techniques qui demanderaient des heures de travail pour tout pianiste.
Malheureusement, cette aisance ne s’accompagne d’aucun véritable enthousiasme pour le piano dans un premier temps.

Malgré la présence de sa mère, Vladimir évolue seul, et déchiffre tout ce qui se présente à lui ; il sera déjà un grand admirateur de Serge Rachmaninoff ou des transcriptions d’opéra, un domaine qui le fascinera et qu’il affectionnera tout particulièrement.

A neuf ans, il s’attaquera à un cycle de quatre opéras de Richard Wagner « Tétralogie » un monde qui le bouleversera.
Il parvient à mémoriser cette somme de musique alors même que les pièces les plus fondamentales dans l’apprentissage de la musique lui manquent encore.

Horowitz est un élève très apprécié de ses camarades d’école. Selon ses dires, tout le monde l’aimait car il était toujours au fond de la classe le « mauvais petit garçon ».
Il rajoute même :

« A l’école je n’apprenais rien, je pensais à la musique » .

Il avait comme surnom de ses camarades de classe :« le pianiste fou ».

Horowitz n’évolue pas comme les autres enfants et se distingue déjà très jeune comme un pianiste indépendant qui aime jouer à l’instinct et faire comme il le ressent.

Ses parents décident de le mettre au conservatoire de Kiev.
Vladimir Puchalski sera son professeur de piano, celui-ci dirige l’école de musique depuis 1877. L’enfant trouve un intérêt chez le vieux maître, un écho à son propre intérêt pour les compositeurs romantiques. Mais, fidèle à lui-même, c’est son individualité et sa propre personnalité qu’il cherche à transposer coûte que coûte sur son clavier.

Le professeur et Horowitz se supportent néanmoins, malgré quelques désaccords, et, à défaut d’enthousiasme, Vladimir a suffisamment de sérieux dans les exercices techniques et les oeuvres imposées pour en tirer des leçons utiles et un enseignement complet.

D’après les dires Horowitz :

« J’étais un élève très doué ; à mon examen de fin d’étude, j’ai joué avec tant d’éclat, que le jury et les professeurs se sont levés. C’était une première dans l’histoire du conservatoire ».

La musique selon Horowitz

Horowitz est un pianiste très peu démonstratif physiquement. En parlant de son jeu, il évoque justement que « tout se passe à l’intérieur » ; il n’apprécie guerre les pianistes maniérés, surjouant avec les yeux fermés levant la tête vers le ciel.
Par ailleurs, dans son salon où il enregistre en toute intimité plusieurs œuvres, filmé et interviewé par une équipe de tournage, il rajoutera :

« Me regarder ne présente aucun intérêt ».

Compositions, arrangements, transcriptions du pianiste Vladimir Horowitz

Horowitz et son besoin absolu de composer : son goût pour l’écriture musicale se manifestera très tôt et le hantera toute sa vie :

« Je suis un compositeur » balbutiait-il régulièrement.
Ainsi, il est arrangeur de nombreux ouvrages en tout genre qu’il sublime musicalement et techniquement (des retranscriptions d’opéras, de symphonies) ; et la rareté de ses apparitions en public ne leur donne que plus de prix.

Je pense immédiatement aux Rapsodies Hongroises, ou à la très connue danse macabre de Saint-Saens (d’abord arrangée pour piano par Liszt), également à la marche nuptiale de Mendelssohn, mais encore à sa merveilleuse transcription de la marche militaire américaine Stars and Stripes Forevener de John Philip Sousa où vous pourrez découvrir à certains moments, quatre voix différentes à la fois.

Je pense aussi au travail plus délicat et moins radical de discrètes modifications du scherzo n°2 en si bémol mineur de Frédéric Chopin par exemple.
Et enfin, les variations de Carmen, extrait de l’opéra de Bizet, connaîtront un succès considérable.

Biographie du pianiste

En 1912, il entre au conservatoire de Kiev.
Il sera l’élève de Serguei Tarnovski, Vladimir Puchalsky, et de Felix Blumenfield.
En 1914, il rencontrera Alexandre Scriabine.
En 1922, il donnera son premier concert à Kiev.

Entre 1922 et 1925, il donne des concerts dans le cadre du bureau soviétique des concerts.

En 1925, il quitte l’URSS pour l’Allemagne.
En janvier 1926, il donnera un récital à Berlin, on le surnommera « l’ouragan des steppes ». Il donnera un récital à Paris la même année.

En 1927, il part pour les Etats-Unis.
En 1928, il donnera son premier concert américain sous la direction de Thomas Beecham.
Dans le public, se trouvent Josef Hofmann, Benno Moiseiwitsch et Serge Rachmaninoff.
Il fera la connaissance de ce dernier, et deviendra très rapidement l’ami très proche de Rachmaninoff.
Celui-ci déclarera au sujet de son troisième concerto interprété par Vladimir :

« qu’il n’avait pas imaginé qu’on puisse le jouer aussi brillamment qu’Horowitz » .

Par la suite, Horowitz deviendra un grand spécialiste de Rachmaninoff.
Par ailleurs, Rachmaninoff déclarera que Horowitz était le seul à comprendre aussi bien sa musique ; il mentionnera également que Horowitz jouait encore mieux certaines de ses propres oeuvres.
Rachmaninoff dira :

« Avant de rencontrer Horowitz, j’ignorais les possibilités du piano ».

Lors du reportage dans sa maison des Etats-Unis, le journaliste évoque le fait que Horowitz joue mieux la sonate numéro deux de Rachmaninoff que son compositeur lui-même, Horowitz rétorquera :

« Pour le concerto numéro trois c’est vrai »

En 1932, Horowitz enregistre la sonate pour piano de Franz Liszt.
En 1933, il rencontre le chef d’orchestre italien Arturo Toscanini et donnera son premier concert avec lui (Cinquième concerto de Ludwig van Beethoven). Je tiens à mentionner que Horowitz se mariera avec Wanda Toscanini, la fille du chef d’orchestre, la même année.

En 1936, Vladimir et Wanda partent pour New-York. Durant trois ans, il ne donnera pas de concerts.
En 1946, Vladimir Horowitz signe un contrat d’exclusivité avec RCA Records, et interprétera en 1949 la sonate en mi bémol mineur de Samuel Barber.
En 1953, il donnera un récital pour le 25ème anniversaire de ses débuts américains.
De 1953 à 1965, Horowitz met un terme pour la deuxième fois à ses concerts ; en revanche, il enregistrera à son domicile une sorte de documentaire en toute intimité.

En 1965, il donnera une dizaine de concerts aux Etats-Unis.
Troisième interruption de sa carrière de 1969 à 1974.
En 1975, on le trouvera dans la prestigieuse Carnegie Hall, pour un récital « pour les européens » .
En 1978, à l’occasion du jubilé de ses cinquante ans de carrière, il interprétera le troisième concerto de son ami Serge Rachmaninoff.

En 1982, il donnera deux concerts à Londres.
En 1985, il se produira à Paris au théâtre des Champs Élysées. Il sera par ailleurs décoré de l’ordre national de la légion d’honneur (au titre de chevalier) et de l’ordre du mérite de la république italienne.

En 1986, il se produira à Moscou au conservatoire Tchaikovsky. Cette même année, il se voit octroyer la médaille présidentielle la liberté des Etats-Unis.
En 1989, il sortira son dernier disque enregistré à son domicile aux Etats-Unis chez Deutsche Grammohon, intitulé « Horowitz at home ».

Vladimir Horowitz meurt chez lui à New-York le 5 novembre 1989 d’une crise cardiaque. Il sera inhumé dans le tombeau familial d’Arturo Toscanini à Milan ; son épouse le rejoindra en 1998.

Merci de votre lecture

Bien musicalement

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